Pensée, perçue, ou simplement supposée, toute chose a une forme, et n'est
rien au-delà. Mutilation terminale
qui produit l'idée d'un néant fondateur où tout se crée. Ce petit lambeau de vide au bord des choses est la semence du
dieu.
poitrine d'os creux. moulage
vide. reconquête du pays sur la
ligne de front. intention de durer.
L'appropriation conceptuelle de dieu entraînerait ipso facto sa propre
annulation, faute d'une instance apte à la valider. Dieu est, pour nous, la perte du savoir qui l'aurait anéanti.
massacre des pas.
franchissements morts. victoire sans
trace et sans mémoire. ossements
poussés devant l'excavatrice. toujours
devant. toujours créer le monde.
Reculer d'un pas. Disparaître
comme de l'eau qui reflue. Dénuder
l'espace paradoxal où germe la pensée de toutes les choses qui ne peuvent pas
se penser. C'est le lieu où
l'absence devient présence, où ne pas être se transforme en être, et qui
devient de proche en proche matrice entreprenante du suprême impensé, quel que
soit son nom.
crachat étoilé. fouet de
flaques vives. débris de lumière
dans les mares. insigne de fissures
et terre désignée. fermoir de
failles poitrine collée aux gerçures du sol.
l'os rassemble alors les diverses directions de la chute. jonction finale des trajets offerte à l'acte de reculer.
Notre incommensurable absence, pure inexistence dans l'avenir, ombre
corruptrice d'un passé aboli, dégénère aisément en révélation. Vide fondamental, habitacle d'un être
aussi grand que lui, présence absolue mesurée par la plus absolue des absences,
gabarit monstrueux qui mesure l'éternel.
sol nu après la chute. voir
apparaître vides et indemnes tous les territoires de l'absence. nous les avions pourtant bien conquis
et bien piétinés. il faudra ramper
encore pour égorger la bête au loin qu'on est.
Je ne pénètre pas dans le temps car le temps où je suis est un obstacle
au temps, un caillot, un sceau intact.
Je ne pénètre pas dans le temps où je suis, car j'y suis avant d'y accéder. Interdit à moi-même autant qu'un dieu
mal conçu. Origine et modèle de
l'être inaccessible.
plaine ouverte. tronçons
ligneux et vent jusqu'au bord. le
temps de passer avait durci. durée fossile. époque privée de nom.
Le temps et l'espace où nous ne sommes pas est immédiatement contigu au
temps et à l'espace où nous sommes.
On le toucherait en tendant simplement la main, en forçant un peu la pensée, en
accroissant notre être à la manière d'un pseudopode. Quelque cause nous retient.
C'est de cette façon que dieu paraît être et paraît interdit.
dormir longtemps dans la fange tiède.
engorgement du temps dans son propre cul de sac. le pire est maintenant.
toute la durée du monde visible et annulée.
Nous sommes le sujet que nous sommes et aussi le sujet qui se voit être. Ce dédoublement germinal, cette
scission embryonnaire se transforme en génération d'un dieu et de ses
innombrables répliques.
lécher l'ombre faciale.
lointain d'eau noire dans la nuit.
face vide. monde aux dents mordre et
manger. incrustation de chair
nocturne dans le grand moule visage creux.
Du jour où j'ai dû admettre qu'un autre me voit, l'image naquit d'un être
autre que l'humain, semblable à cette humain que l'autre regard engendre, et
qui est moi et autre que moi. Une
toute petite transcendance pendulaire, chiquenaude et rebond, éclosion de tous
les dieux.
chien du devenir. proie morte. temps aux orbites. retour du monde après la putréfaction.
Nous nous voyons malgré nous quelque peu, très peu, éloignés et à
l'extérieur de nous mêmes. Et chacun
s'agrippe à la surface de son corps comme un bord d'un abîme avant la chute. Corps dressé en frontière devinée du
dehors, comme si nous étions déjà un peu plus loin que l'endroit où nous sommes. C'est donc nous, et non pas le dieu,
la source de cet au-delà précaire.
Et nous y construisons notre jumeau divin.
vestige rémanent la chose nous enferme. déchet de frontières dans le corps couché. animal vu et revu.
traces stercorales sur le pourtour du pays.
semailles de terre entièrement intérieure.
La simple conviction implicite et inévitable que toutes les choses
existent, et les attitudes de doute, négation, anéantissement, prière, extase
qui soutiennent la réalité de cette thèse, voilà ce qui requiert un sujet plus
grand que nous, qui connaît toutes les choses. Si toutes les choses existent, il y a un dieu.
rite d'inhumation ralenti par la peau.
engouffrement continu de la matière du monde. le corps distrait le prédateur et les choses existent.
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